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Photo du rédacteurStephan Ruvio

LES ARBRES, MÊME MORTS... ILS NOUS PARLENT



Arbre de vie


Entre la dentelle des plaines descendantes

Et le givre épousé des sous-bois

Jusqu'aux pupilles pétillantes de l'étang

J'ai tracé avec mes doigts couturiers

Des lignes traversantes


J'ai remonté l'écorce spongieuse

De la forêt élancée à travers ciel

Jusqu'à la cueillette d'un drap

Décimé de tes éclats

Éparpillés près des carpes


Dans le rire scintillant

D'une nuit végétale

Seul l'enfant près de moi

A ourlé de ses rêves

L'étreinte scellée il y a dix ans





Sakura tatoo


Comment une forêt de Sakura

A-t-elle pu se retrouver secouée

Juste à l'orée de tes fesses


C'est que

Dans le miroir érotique

D'une chambre d'hôtel de Mexico


Les fleurs de cerisiers roses

Imprimées sur ta cambrure nacrée

N'ont cessé de brutaliser

Ce regard inassouvi

Qui cognait à la porte

De mon bas ventre



Généalogique


En trébuchant

De mon arbre généalogique

J'ai entrepris

Ce tour d'écorce

À chaque branche

D'où coulait la sève trouble

De portraits lointains

Dont mon père s'était détourné

De l'encadrement





Hibou


J'hulule

Sur les branches de la nuit

C'est comme hurler

Sans elle

Et avoir l'air con

De se retrouver avec un u en plus

Dans les bras



Platanes


Les réverbères

Sur le bord des palissades

Striées de feux de croisement

Trempent leur col de cygne

Dans la tournure noire

Des chemins de vitesse

Et des vitraux industriels


Pendant que de dignes platanes

Élevés en haies d'honneur

Accueillent l'avènement

De villages de pierre

Sur des routes vertes


D'un croisement à travers champs

J'évite la collision

Entre un platane

Et un poème





Land art


J'ai gravé sur un arbre

Au couteau

Notre blessure

Pour qu'elle se souvienne

Jusqu'après

Notre mort


Si le fusain je maniais

d'une esquisse

je voudrais retrouver

l'écart évasif

entre les lèvres

d'un premier baiser








Bibliothèque


Aujourd'hui j'ai construit

Une maison

À l'abri de la poussière

Et de la lumière qui jaunit

Les pages des livres


Aujourd'hui j'ai construit

Une maison

De bois brûlé

Pour embellir les veines

Coulant le long des arbres

Comme des sourires

Caracolent sur le visage

Des femmes qui dansent

Autour des feux d'été


Aujourd'hui j'ai construit

Une maison

Que je n'ai cessée de caresser

En fermant les yeux

Sur le bruit des branches

Dans les forêts ondulées

Ivres de vent


Aujourd'hui j'ai bâti

Un abri merveilleux

Pour protéger le cœur

Du temps qui dérive

Entre les lignes

De la rivière symphonique

Orchestrée par les chapitres

Des hommes inventés

Au bord de leurs chemins


Aujourd'hui j'ai construit

Une bibliothèque

Pour oublier que plus jamais

Tu n'essuieras tes pieds

A l'entrée de la maison





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